FACT - Joséphine Baker par Marin Chapoutot

popolyptic Par Le 09/12/2021 0

Dans Vie du Monde

Le 12 avril 1975 disparaît une femme, une femme qui a élargi les frontières de  l’humanisme, une femme qui  lors d’un siècle de guerres, de larmes et de famines a su défendre un idéal et une quête, une quête pour la liberté. Ce mot devenu commun est pourtant le fruit de sacrifices dont les stigmates sont encore visibles. Joséphine Baker, ce nom mythique, symbole d’une époque, résonne aujourd’hui comme le son d’un héroïsme romanesque, d’un destin hors norme et d’une personnalité mêlant générosité et grandeur d’esprit. Mariée à quatorze ans dans une Amérique ségrégationniste, vivant de spectacles de rue dans le Mississipi des années vingt, le racisme est la règle, la tolérance l’exception. Nul ne se doute que cette enfant des rues serait cent ans plus tard au banquet des grands de l’histoire de France. Icône des années trente dans le Paris des années folles, elle sut s’approprier la capitale française dont elle deviendra la femme préférée. Cette relation déterminante qu’elle lia avec la Ville Lumière forgera en elle un patriotisme qui s’illustrera par son engagement dans la France libre auprès du Général de Gaulle. Elle réalisa pendant la guerre plusieurs missions se traduisant notamment par la dissimulation de messages à travers des partitions de musique. Militante antiraciste de premier plan, elle lutta auprès de Martin Luther King pour les droits civiques à partir des années cinquante et dénonça avec force et vigueur le racisme des institutions américaines. Elle s’est également  engagée dans la lutte contre l’antisémitisme au côté de la Ligue Internationale Contre l’Antisémitisme (LICA)  qui deviendra en 1980 la Ligue Internationale Contre le Racisme et l’Antisémitisme (LICRA).  Parcourant la planète, découvrant au travers de ses tournées la diversité d’un monde en perpétuelle évolution, elle adoptera au cours de sa vie douze enfants venant de tous les continents qui formeront sa « tribu arc- en- ciel » comme elle aimait la nommer.
Sa vie le prouve, tant par ses choix personnels que par ses prises de positions publiques et ses combats, Joséphine Baker fut une ardente défenseure d’un universalisme prônant la fraternité, valeur cardinale de notre nation. Cette personnalité iconoclaste aux mille vies incarne une certaine idée de la France. Défendant par devoir et passion ce pays qui en 1940 trébucha vers le totalitarisme, elle s’attela à le redresser pour continuer à faire vivre la flamme de la liberté. La virtuosité de ce parcours artistique et idéologique est l’antidote face au nationalisme mortifère, et l’espoir d’unir autour de valeurs communes des gens venant d’horizons différents. Au côté de Romain Gary, Adriana Scriabine, Joseph Kessel et bien d’autres, elle fait partie de ces femmes et de ces hommes nés en Russie, Pologne, Argentine qui ont choisi la France pour accomplir leurs destins.

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